Sorry, James & Alix

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Tu as pris deux jours de repos, tu n'as pas arrêté au boulot. Tu as parfois l'impression de vivre là-bas, ce n'est pas pour te déplaire, parce que si tu es au boulot, ça veut dire que Jayden est aussi au boulot. Mais tu es mariée, ce mari tu as encore des sentiments pour lui ; tu as tendance à fuir la maison, même en repos. Tu as voulu t'isoler chez tes parents aujourd'hui, pour ne pas croiser son regard, pour ne pas avoir à lui mentir. Tu t'en veux, parfois plus que d'autres jours. Mais en ce moment c'est pire. Vous n'avez même plus de moments intimes, parfois tu simules déjà de dormir ou des excuses : mal au ventre, mal au dos...
Tu rentres à la maison, l'espoir qu'il ne soit pas encore rentré. Tu regardes ta main qui est posée sur le volant, ton alliance. Un vague sourire se dessine. Parce qu'il était beau ce mariage. Tu te gares. La maison semble vide, aucun bruit, tu es seule. Vous allez être tous les deux ce soir, plusieurs heures, avec un repas. Cela fait longtemps que ce n'est pas arrivé. Tu te décides à cuisiner, passer le temps, oublier, penser à autre chose. Paraître pour une femme bien, parfaite ? Peut-être ! Il est dix-huit heures, tu es même en train de déguster un verre de vin ; ça détend.
Tu as fait un brownie, des donuts. Finalement, tu as fait que de la mal bouffe, parce que tu as envie de t'envoyer en l'air avec des gâteaux. La bouffe c'est la vie ! Tu entends la voiture de ton mari se garer dans l'allée de la maison. Ton coeur se serre. Mais il faut que tu te calmes, vraiment. Tu bois une nouvelle gorgée du vin. Tu oublieras pas de remercier ton père pour cet excellent vin blanc.
Tu ne sais pas ce qu'il va se passer ce soir, tu ne veux pas lui faire du mal, pas de peine. Alors, tu vas essayer d'être bien ce soir, une gentille femme. Tu as un peu d'espoir qu'il ait eu une dure journée, qu'il soit fatigué, qu'il ait besoin de dormir tôt. Puis éviter les discussions, notamment sur le boulot, sur ce qui peut concerner Jayden.

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Il coupe le contact de sa voiture et range machinalement ses clefs dans la poche de son jean, mais il ne bouge pas. Il ne sort pas de l’habitacle de la voiture, non, il se contente de regarder devant lui. Il soupire et appuie son crâne contre l’appuie-tête. Sa femme est à la maison, il arrive à voir la lumière qui sort par la fenêtre de la cuisine et celle du salon aussi. Sa voiture est probablement garée dans le garage, qu’il se dit. Ce n’est pas qu’il ne veut pas la voir, c’est plutôt qu’il a un peu peur de ce qui risque de se dire s’il passe la soirée avec elle. Va-t-il enfin lui parler de Jayden? 

Il se demande si elle est à la maison depuis longtemps déjà. Il n’est plus certain de savoir quand elle travaille, surtout ces derniers temps. Il a l’impression qu’elle n’arrête jamais. C’est ça ou elle s’arrange pour travailler quand lui ne travaille pas. Il soupire à nouveau. Il espère quand même qu’il se fait des idées et que ce n’est pas le cas. 

Il pousse finalement la porte d’entrée de la maison après avoir passé une bonne minute ou deux assit dans sa voiture. « Alix? » Un réflexe, il l’appel pour savoir où elle est dans la maison. « C’est moi. » Il retire ses bottines maladroitement en forçant avec le pied opposé pour chacune, puis se penche finalement pour ensuite les replacer aux côtés de ceux de sa femme. « Désolé d’arriver un peu tard, j’ai dû finir de rédiger un rapport au poste. » continu-t-il en se dirigeant vers la voix de la policière dans la cuisine. « Ça sent bon, chérie. » sourit-il sur un ton comme pour la remercier en même temps. Il remarque qu’elle a ouvert une bouteille de vin. En passant à côté d’elle pour se prendre une coupe dans l’armoire, il s’attarde un peu à côté d’elle, lui prend la main et la serre doucement. Pas longtemps, mais juste comme pour la saluer, lui dire bonsoir. « Comment est-ce que tu vas? » Il remplit le verre de sa femme et s’en sert un à lui aussi. 

Il commence à se rappeler pourquoi il était stressé à l'idée de se retrouver seul avec elle. Il vient de penser à elle et son coéquipier. « Pas trop fatiguée? Je sais que tu as beaucoup de boulot ces derniers temps. » Il ne cherche pas à la piéger, non, ce n'est pas son genre, mais d'aborder le sujet, là et maintenant, ça a été plus fort que lui. Il sent que s'il ne le fait pas tout de suite -même s'il n'en a pas envie- il ne le fera probablement jamais. 

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Tu as vu sa voiture arriver. Tu ne sais pas comment la soirée ça se dérouler. Cela fait tellement longtemps que lui et toi vous n'avez pas dîner comme un vrai couple, un couple marié. Tu ne sais pas comment agir, pour avoir l'air d'une femme gentille, aimante et loyale. Tu es juste gentille. Le vin parvient à te détendre, tu sais que ce n'est pas une solution miracle. Pour ce soir, cela va t'aider. Mais tu n'abuseras pas de l'alcool, parce qu'en ce moment tu es assez fatiguée, pas au top de ta forme physiquement ; alors l'alcool n'est pas conseillé. Tu sors les derniers cookies du four, au moment où tu poses le gant de cuisine, tu entends la porte s'ouvrir. Il prononce ton prénom, tu indiques ta présence dans la cuisine.
Il s'excuse de son retard. Tu as presque envie de pleurer comme une gosse, parce que bordel il est tellement adorable, tellement attentionné et toi, tu fais que de la merde, parce que il y a des choses que tu ne parviens même plus à contrôler. Tu souris lorsqu'il te dit que cela sent bon.
- Cookies et brownie, je pense que le repas de ce soir sera un énorme goûter.
Tu n'as pas touché aux ustensiles de la cuisine depuis un bon moment, plus l'envie, plus le temps. C'est peut-être un moyen de te couvrir aujourd'hui ? Une femme qui cuisine est peut-être une femme aimante ? Ouai... tu ne sais pas trop ! Il se rapproche serrant ta main, tu déposes un baiser sur l'une de ses joues. Il te remplit à nouveau ton verre, tu le remercies en trinquant avec son verre. Tu ne sais pas vraiment à quoi tu trinques ! La réussite du brownie ?
- Ca va !
Tu restes vague, une fois de plus. Tu ne sais faire que ça ces derniers temps, échapper aux questions, répondre brièvement, répondre parfois par une autre question. Tu bois une gorgée de ton vin. Ton échappatoire pour ce soir.
- Plutôt fatiguée, mes deux jours de repos vont me permettre de rattraper mon sommeil, me reposer. C'est pas évident le boulot, heureusement Jayden est là !
BORDEL ! Il a bien fallu que tu places son prénom, cela a été plus fort que toi : Jayden et encore du Jayden à toutes les sauces. Mais sans ce coéquipier, tu aurais peut-être quitté ton poste, qui te prend vraiment beaucoup de temps. Tu te rends compte du prénom que tu viens de prononcer, alors tu t'empresses de lui poser une question.
- Et toi, le boulot ?

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Elle a fait des biscuits et des brownies. Elle plaisante en disant que leur souper sera plus un énorme goûter, au final, et il sourit. Franchement, il s’en fiche. Non seulement il sait que le tout va être délicieux, mais il n’a pas très faim non plus. Il apprécie de la voir à la maison et aussi de l’avoir avec lui, sa femme. 
Il se détend un peu lorsqu’elle dépose un baiser sur sa joue. Son contact lui manque. 

Elle va bien, qu’elle dit, mais elle ne s’étale pas sur le sujet. Du moins, elle ne rajoute rien jusqu’à ce que James mentionne son boulot. Il pense alors si fort à Jayden, à ce moment-là, qu’il s’étonne lui-même d’à quel point il a été surpris de l’entendre prononcer son nom. On aurait dit qu’elle lisait dans ses pensées. Elle est passée du fait qu’elle est plutôt fatiguée, qu’elle va se reposer pendant ses deux jours de repos, au fait que ce n’est pas évident mais, qu’au moins, son coéquipier est là pour elle. Ça aurait pu avoir l’air anodin s’il ne s’agissait pas de Jayden, encore Jayden, précisément Jayden, se dit James. Ça lui fait plus ou moins l’effet d’une masse en pleine poitrine. Il ne sait pas si le pire est le stress à l’idée de ce qui va suivre ou celui à l’idée qu’il évite encore une fois la conversation et doive continuer à faire comme si de rien était. 

Sans attendre, presque comme si elle s’empresse de changer le sujet, elle lui demande comment va le boulot, de son côté. Sans trop y réfléchir, il hausse les épaules. « Ça va. » C’est à son tour d’être vague, cette fois. Il n’essaie pas de l’embêter, c’est plutôt qu’il n’arrive pas à se concentrer sur autre chose que sur ce qu’elle lui a dit, il y a quelques secondes.
 
Il boit une gorgée de vin et prend une pause. Il jette un coup d’œil en direction du salon, mais c’est plus pour éviter le regard de sa femme pendant quelques instants de plus. Il boit à nouveau un peu de vin. « Je… » Il soupire. « Est-ce que… Est-ce qu’on peut parler? » Il la regarde enfin. Il a de la difficulté à s’exprimer et il ne sait même pas vraiment ce qu’il veut dire non plus. Tout ce qu’il sait, c’est que ça doit être dit, ça doit sortir. Il a commencé. Il n'est plus le temps d'arrêter. « Je ne veux pas gâcher la soirée, mais je sais que je vais le faire Alix. » C’est pour s’excuser sincèrement, qu’il dit ça, parce qu’ils auraient sans doute pu passer une belle soirée ensemble et il sait aussi qu’elle a fait un effort pour lui, mais il en a marre. « Qu'est-ce qu'on fait, toi et moi? » Il est vague, il le sait, mais il ne veut pas à prononcer ces mots-là. Il n’arrive pas à lui demander si elle le trompe, si elle en aime un autre, si elle aime Jayden, ou même si elle l’aime lui. « Je… J’ai compris depuis un certain temps, tu sais. » Il hausse les épaules et appuie sa hanche sur le comptoir, toujours de face à elle. Il espère qu'elle ne remarque pas le léger tremblement de sa lèvre inférieur. « Je ne dis pas ça pour te faire sentir coupable ou... je ne sais pas. Je suis un peu perdu, là, Alix. » 

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Tu ressens le besoin de faire semblant que tout est correct, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Maintenant que la situation est autant dégradée, c'est compliqué de faire semblant. Et tu ne veux rien dire, rien avouer. Car finalement, ça pourrait créer des problèmes à Jayden, sa fiancée pourrait être rapidement mise au courant de cette situation. Tu souris bêtement. Tu as fais des gâteaux parce que tu penses que le sucré apaise les tensions. Mais non !
Il te demande si c'est possible de parler. Parler mais de quoi ? Tu fronces les sourcils en signe de questionnement. Qu'est-ce qu'il veut te dire ? Tu espères qu'il ne va pas remettre l'histoire de faire un bébé sur le tapis. Tu es si désespérée de cette situation que tu lui ferais peut-être croire que tu en veux finalement un. Mais ça lui apporterait de l'espoir et ça c'est mal, car un jour tout va exploser. Tu attends qu'il continue à parler, tes mains deviennent moites. Ton rythme cardiaque s'accélère, tu as peur des mots qui sortiront de sa bouche.
Sa question te foudroie, puis il enchaîne. Il a compris quoi ? Tu restes silencieuse, tu es désarmée. Tu voudrais mettre tout en pause, appeler Jayden et lui demander ce que tu dois faire ou dire. Comment calmer le jeu ? Mais tu es seule, tu as aucune baguette magique. De toute façon, tu ne dois pas dire la vérité. Alors tu vas mentir. Tu ne supportes pas ça. Mais tu ne pensais pas qu'un jour tu aurais à avoir une discussion avec ton mari. Tu te rapproches de lui, tu attrapes l'une de ses mains dans la tienne.
- Je ne comprends pas... tu sais je suis fatiguée en ce moment, mon père est souvent sur mon dos, même tout le temps.
Ton mari, il t'attire toujours, tu as encore des sentiments, alors tu tentes d'user quand même de ton beau sourire, tu lui caresses délicatement l'une de ses joues avant d'aller déposer un baiser sur son cou.
- On devrait profiter de cette soirée pour se retrouver. Je ne veux pas parler boulot, ni de mon père...
Tu ne sais pas si ça va l'apaiser, mais tu veux absolument éviter une discussion, éviter de dire cette vérité sur Jayden et toi.

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Elle le regarde, silencieuse, hésitante peut-être, qu’il se dit. Elle se rapproche de son mari, éliminant la distance qu’ils étaient presque habitués d’avoir entre eux maintenant et prend l’une de ses mains dans la sienne. Il vient de lâcher une bombe en lui demandant ce qui se passe entre eux, mais elle est bien déguisée. Trop bien, peut-être, parce qu’il n’est pas certain qu’elle ait compris. Elle, elle dit que non, qu’elle ne comprend pas trop ce qu’il veut dire. Elle s’empresse de lui assurer que c’est seulement parce qu’elle est fatiguée, en ce moment. Elle rajoute que son père est toujours sur son dos. Il la croit, il le sait même, parce qu’il le voit bien au poste. Il travaille dans le même bâtiment qu’elle, après tout. Il fait aussi le même boulot et il connait bien son père. Il est l’une des personnes le mieux placé pour comprendre, au final. Pourtant, ça ne lui suffit pas. Ce n’est pas assez parce qu’il sent, il sait qu’il y a plus. Il se passe un quelque chose de plus. Ce quelque chose s’appelle Jayden.

Elle sourit, mais il sent que c’est pour le rassurer, que son sourire n’est pas à cent pour cent honnête. Peut-être qu’il se fait des idées. Elle se rapproche encore un peu de lui, caresse sa joue et vient déposer un léger baiser à la base de son cou. Il ferme les yeux un instant. Il voudrait se laisser aller, profiter de cette soirée pour se retrouver, comme elle lui dit alors si bien, mais le prénom du coéquipier de sa femme reste gravé au fer rouge dans son esprit. Il se demande alors si elle l’embrasse ainsi, elle aussi. Son cœur se serre douloureusement dans sa poitrine. Il fait non de la tête comme pour chasser cette idée et se décale un peu d’elle, pas assez pour la repousser vraiment, mais quand même juste assez pour l’empêcher de l’embrasser à nouveau sans avoir à faire un nouveau pas vers lui. « Désolé. »

Elle ne veut pas parler de boulot ou de son père, qu’elle dit, mais ce n’est de ni l’un ni l’autre qu’il est question. « J’aimerais vraiment pouvoir faire ça, Alix, mais je n’y arrive pas… » Il prend une grande inspiration, autant pour se donner du courage que pour se donner encore quelques secondes de répits. « Je t’ai dit que j’ai compris ce qui se passait. » commence-t-il. « Et je pense que tu sais aussi bien que moi que je ne parlais pas de ton boulot. » Il soupire doucement et fait une autre pause. « Je t’aime Alix, tu sais. » Son regard s’assombre un peu. « Mais je ne peux pas te partager. Je ne veux pas te partager avec lui. » Et voilà, c’est dit.